Rencontre avec Josiane : Le temps d’un café

Nous nous sommes installés dans sa chambre. Celle que Josiane occupe depuis six ans au foyer du Parc, là où les multiples tableaux, photos de famille ou encore peluches garnissent la pièce. Contre un mur, des clichés de bébés chats. «Mes minons», comme les appellent Josiane. En levant la tête, on aperçoit ­– un peu plus étonnant – une photo de Stéphane Plaza, placardé derrière un meuble. «C’est un beau monsieur ! Mais il est certainement déjà marié, non ? Vous en pensez quoi ?» Le décor est planté. Josiane est pleine d’entrain, un peu blagueuse et surtout de très bonne humeur.

Il faut dire que la doyenne de la Fondation (79 ans) n’a pas perdu son sens de l’humour. «On fait un peu les folles ici. Mais bon, ça fait du bien de faire les folles. L’ambiance, il faut bien quelqu’un pour la mettre ! Mélissa, l’éducatrice, c’est un peu la spécialiste pour ça. Elle m’entraîne dans son sillage», raconte-t-elle sourire aux lèvres. Josiane a par exemple pris l’habitude de faire retentir la sonnette de son lit pour solliciter une éducatrice. Une fois arrivée, cette dernière remarque qu’elle n’a besoin de rien. Josiane a réussi son coup.

« Servez-vous » !

A son grain de folie singulier, ajoutons sa générosité. Si Josiane détourne parfois son regard pour le laisser voyager dans un univers qui lui est propre, elle n’en oublie pas pour autant de soigner l’accueil de ses convives. «Vous voulez un café ?», demande-t-elle à son interlocuteur en recevant le sien. Négatif, annonçais-je. Elle renchérit : «Prenez-donc un morceau de chocolat.» Difficile de refuser une seconde fois.

Josiane a bon appétit, comme nous le confirme Estelle, l’une des éducatrices de son foyer. La gastronomie, elle connait. La résidente du Parc participait activement aux activités cuisine lorsqu’elle vivait à la Fondation Eben-Hézer à Lausanne. Une pratique qu’elle a tenu à poursuivre en arrivant à St-George, en 1985. Ici, elle apprécie également tricoter des chaussons qu’elle distribue ensuite à des enfants. «C’est un bel accomplissement de pouvoir élaborer le vêtement du début à la fin.»

Le souvenir des pompiers

C’est que l’aînée de l’institution souhaite rester active au quotidien. Avant de nous rejoindre pour l’entretien, elle a tenu à participer à la danse. «On appelle ça de la danse, mais c’est plutôt tranquille. On manipule des objets en restant assis, détaille-t-elle. Une chose est sûre, on n’a pas vraiment le temps de se reposer ici à St-George. Enfin oui, durant les siestes !» Outre les animations institutionnelles, Josiane apprécie aussi regarder la télé. Elle dispose dans sa chambre de son propre écran depuis Noël dernier. De là à contempler les émissions de Stéphane Plaza ? «Oh pas toujours, mais pourquoi pas quand il est là. J’aime bien regarder les animaux. Par contre, depuis cette télévision, je peux uniquement regarder les DVD. Alors pour les émissions, je me rends plutôt au salon du foyer.»

Des souvenirs, Josiane en a de nombreux à la Fondation. Elle ne se souvient pas de tous, mais parvient à faire revenir celui de l’incendie, en 2010. «Quelqu’un avait mis le feu, vous vous rendez-compte. Ce n’était pas facile. Il y avait… comment ils s’appellent ceux-là. Les pompiers, voilà ! Ah ils sont jolis les pompiers. J’aime bien voir leurs costumes !» L’entrevue touche gentiment à sa fin. Josiane, emblème de l’institution, s’apprête à aller partager le repas de midi avec les autres résidents. Emportée dans son élan et dans notre échange, elle s’aperçoit soudain qu’elle n’a pas encore touché à son café reçu un quart d’heure plus tôt.

Les travaux touchent à leur fin à Concise !

La plupart des travaux ont commencé au durant l’été 2019. Les difficultés liées à la situation sanitaire n’ont pas été sans conséquences pour l’avancée des travaux, lesquels ont subi de multiples arrêts et retards. Aujourd’hui, ils touchent à leur fin ! 

Il s’agit avant tout d’une réfection et d’un agrandissement des deux foyers qui composent le site des Bioles : Tourmaline et Aventurine. Une rénovation qui s’inscrit dans la volonté de l’institution de poursuivre sa marche en avant.  Car si, dans un premier temps, il était question de répondre à des normes en vigueur, le projet a pris une nouvelle forme au fil du temps.  

Des espaces de retrait

En clair, il s’avérait nécessaire d’aménager des lieux nouveaux pour répondre aux besoins des résidents. Désormais, les Bioles sont équipés de leur salle polyvalente où il est possible d’accueillir les résidents des deux foyers pour des animations, mais aussi l’ensemble des collaborateurs dans le cadre de colloques. Le site possède également une nouvelle salle d’accueil ainsi qu’un vestiaire pour ses résidents. Une réorganisation géographique et une redéfinition des espaces a en outre été pensée : la cuisine ne se trouve aujourd’hui plus sur l’un des deux lieux de vie, mais peut compter sur un espace entièrement dédié. C’est également le cas de la buanderie et de l’infirmerie qui siègent dans des locaux flambants neufs et adaptés.  

Grâce à ces travaux, le résident peut bénéficier d’infrastructures modernes et plus proches de ses besoins. Il peut également s’appuyer sur de nouveaux espaces de retrait et disposer de sa propre intimité. Un salon a été réaménagé aux étages de chaque foyer pour accueillir les résidents durant leur temps libre, tandis que des bancs ont été installés ici et là dans la clairière. Autant de nouveautés qui s’inscrivent dans un concept bien connu de la Fondation : le green care.

Des projets à venir 

On l’a vu, la refonte ne concerne donc pas une infrastructure en particulier mais bien l’ensemble du site, ce qui permettra aux usagers d’évoluer dans un environnement plus attrayant. Le mobilier aussi a été repensé ; des meubles, notamment, doivent encore être livrés pour équiper au mieux les lieux de vie.  

Pour l’heure, la partie extérieure du site ne subit aucune modification. En revanche, la Fondation ne cache pas son ambition de profiter des quelques hectares qu’elle occupe sur les hauts de Concise pour revoir ses installations extérieures. En revoyant l’agencement des places qui jonchent les abords des foyers, par exemple, pour en faire de véritables lieux de loisirs et de partages.  

Bonne retraite, Patricia Alexis !

Patricia Alexis est arrivée à la Fondation St-George il y a plus de quinze ans, en 2005. Jeudi 15 avril dernier, elle a prodigué sa dernière journée de thérapie d’art de la parole à l’institution. Un moment qu’elle a tenu à apprécier, avant son départ en retraite. Nous l’avons rencontrée au terme de cette ultime séance. 

Patricia, expliquez-nous comment vous êtes arrivée à la Fondation en 2005 et avec quel objectif ?

A cette époque, je travaillais encore à La Branche, à Savigny. L’infirmière et le médecin qui étaient ici m’avaient contactée, avec la volonté de développer leur panel de thérapies anthroposophiques. Ici, j’ai été engagée comme thérapeute de la parole, avec comme but d’accompagner individuellement ceux que l’on appelait autrefois les «Compagnons». Un très joli nom, n’est-ce pas ?

Effectivement ! Et une thérapie avec Patricia, ça ressemblait à quoi exactement ? Quel a été votre fil conducteur tout au long de votre carrière ?

Il faut savoir que la méthode que j’ai apprise se base principalement sur le développement des capacités artistiques des patients, elle a donc peu à voir avec ce que l’on peut trouver en logopédie, par exemple. Dans ma formation thérapeutique, même les connaissances médicales sont inspirées et sont transmises à travers une approche artistique (ce qui est difficile à comprendre pour la pensée scientifique, mais l’est beaucoup moins pour la pensée holistique !) Les exercices qui m’ont accompagné dans ce développement personnel ont servi de base à mon travail avec les résidents. Mais chaque situation particulière a bien sûr exigé une métamorphose perpétuelle de cette base. Très souvent, les exercices ont été une co-création entre le résident et la thérapeute. Du fait de  son aspect holistique, la thérapie par l’art de la parole n’en reste pas à la bouche, à la langue, à la tête, ni même aux poumons. Elle invite le patient à ressentir la parole dans son corps tout entier et cela se fait par exemple à travers des gestes – soutenus ou non par des balles, des bâtons ou autres -, à travers des rythmes, etc. Mais parler d’une expérience n’est pas encore la faire : je préfère toujours la pratique. Mettons-nous debout et essayons, tiens !

On imagine que le but premier de ces thérapies n’est pas seulement d’améliorer la diction du résident.

Bien entendu. Il y a le côté pratique, mais aussi le développement personnel. Imaginez que tout ce que vous vivez, vous ne puissiez l’exprimer. L’expression fait partie intégrante de l’individualité de la personne. L’objectif était aussi de parvenir à être un peu plus dans la maîtrise de son corps, de sa mobilité fine. Et aussi de gagner en confiance en soi.

Certaines choses réalisées à St-George vous rendent-elles fière aujourd’hui avec un peu de recul ?

Je suis contente de certaines choses, mais le mot fierté n’est pas adéquat. Car en fait, je ne travaille pas seule. Ce que je fais, c’est une pièce de plus qui s’imbrique avec celles des autres : celle des éducateurs, des thérapeutes, des cuisiniers, de la femme de ménage,  de l’administration, etc. De toute cette vie sociale qui entoure le résident. Maintenant oui, dans une thérapie, il y a des moments de joie énormes. Des instants qui peuvent durer deux secondes. C’est le cas par exemple lorsqu’un résident apparaît tout à coup plus lumineux, plus clair, plus présent. A cet instant, j’ai le sentiment que le moyen choisi pour l’aider était le bon. Que je l’ai aidé à vivre quelque chose. 

Finalement, est-ce que les résidents vont vous manquer ?

Aujourd’hui (ndlr : jeudi 15 avril) leur dire au revoir… c’était fort. Le lien que j’ai pu tisser avec eux, au cours de ces années, c’est un acquis, et je l’emporte comme un cadeau. Et je sais qu’ils peuvent profiter à St George d’une prise en charge très variée. Quant à moi, je ne sais pas ce qui m’attend après cette séparation. Mais tout le monde part en retraite… Aujourd’hui, c’est mon tour. 

Merci pour tout, Patricia !

Bonne retraite

Des activités maintenues malgré la pandémie aux Bioles

Les Bioles peuvent s’appuyer sur des infrastructures inédites. C’est aussi ce que cherchait à obtenir la Fondation St-George en élargissant sa capacité d’accueil et son panel d’activités sur le site des Bioles. Car le lieu possède la particularité de pouvoir amener à ses résidents des conditions de vie unique : un havre de paix séduisant, établi au sein d’une clairière où le chant des oiseaux et les glapissements des animaux rythment le quotidien de cette petite communauté. 

Un contexte unique qui a permis de maintenir les activités quotidiennes malgré la pandémie. Alors que certaines institutions se voient contraintes de repenser leur programme d’animations, les Bioles n’ont pas vraiment connu de coup d’arrêt. Lieu quelque peu décentralisé, nombre plus restreint de résidents (14) et activités qui se déroulent essentiellement en plein air : la formule des Bioles a vécu la crise à sa manière. La mixité entre les résidents a d’ailleurs été conservée, contrairement au site d’Yverdon-les-Bains (lire ici : https://www.fondationstgeorge.ch/sadapter-en-temps-de-crise/).

Le terrain est vaste et les occupations sont nombreuses aux Bioles.

Un concept : le green care

Pour rappel, aux activités d’ordre artistiques, sportives ou encore créatives sont ajoutées des activités en lien avec la nature sur les hauts de Concise. La plupart d’entre elles se font en extérieur, que ce soit aux côtés des animaux ou des végétaux. Les résidents sont menés à travailler avec le bois et les plantes ; ils prennent également soin des animaux du parc, effectuant les diverses tâches que nécessite leur entretien (nourriture, nettoyage). Des promenades avec les ânes sont également proposées, où les bienfaits de la relation homme-animal ont fait leur preuve. De quoi permettre de calmer une crise, par exemple, ou de simplement entreprendre un accompagnement de plus longue durée.

Le dénominateur commun aux propositions d’activités n’est autre que la nature. C’est auprès d’elle que les résidents trouvent leur exutoire. Ils y donnent du sens à leurs actions, ceci à travers un concept appelé green care : une invitation à prendre soin de la nature pour prendre soin de soi. 

Eric, ici lors d’une activité.

Programme adapté

Sandra Cour, responsable du green care à Concise, élabore son programme chaque matin. En fonction, notamment, des ressources offertes par la nature. «Les activités diffèrent chaque saison. L’hiver, on travaillera un peu plus avec le bois. L’été, un peu plus avec les plantes, détaille-t-elle. Maintenant, nous profitons aussi de faire des sorties. Il nous est arrivé d’aller cueillir des noix dans le village. Les résidents participent ensuite à la confection de l’huile, qui est elle-même redistribuée à la fête de Noël de la Fondation. »

Enfin, lors des fêtes ou activités institutionnelles, les bénéficiaires des Bioles descendent à Yverdon. Là où de la musique et des animations en plein air les attendent, lorsque la météo le permet.  

La Fondation a vécu au rythme de Pâques

Il y a comme une petite odeur d’œufs et de lapins de Pâques dans la cour de la Fondation Saint-George. Et pour cause, la semaine a été programmée sous le signe de Pâques, avec des ateliers de décoration de la cour, de cuisine ou encore de musique. Une scène a également été érigée afin d’accueillir les talents de demain comme il se doit. Avec le printemps qui a fait son apparition dans la Cité thermale, les conditions étaient donc réunies pour faire de la cour un véritable lieu de fête après un hiver plutôt calme. La semaine s’est terminée par la traditionnelle chasse aux œufs !